Le Café en revue René Allio, l’art du récit de la scène à l’écran
Café des Images

René Allio, l’art du récit de la scène à l’écran

par Marguerite Vappereau

René Allio sur le tournage de Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma sœur et mon frère... (1976).

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Cet article fait partie d’un cycle

Le Café des Images et la Comédie de Caen s’associent à nouveau cette année pour vous faire découvrir le travail d’un artiste qui partage sa pratique entre théâtre et cinéma, dans le cadre de la seconde édition du festival Écritures partagées, organisé par la Comédie de Caen.


Peintre, scénographe et cinéaste, René Allio (Marseille, 1924 – Paris, 1995) marque durablement l’histoire du théâtre et du cinéma français dont il renouvelle les formes et les genres par un constant travail d’expérimentation. Après des études aux Beaux-Arts, il quitte Marseille à la fin des années quarante pour venir collaborer avec les grands acteurs de la décentralisation théâtrale, Hubert Gignioux puis Roger Planchon. Sa découverte du théâtre brechtien et des réalisations du Berliner ensemble lui permettent de modifier la conception de l’espace scénique et de faire du scénographe l’un des collaborateurs indispensables de la création théâtrale.

Après s’être imposé comme collaborateur indispensable à Planchon au TNP de Villerbanne dans les années cinquante (Henri IV de Shakespeare, La Bonne Âme de Se-Tchouan et Schweyk dans la deuxième guerre mondiale de Brecht et surtout Tartuffe de Molière), Allio initie une carrière cinématographique d’une diversité étonnante entre réalisme et fantaisie. La Vieille Dame indigne (1965) marque avec succès ses premiers pas derrière la caméra. Il impose un regard sensible et attentif à l’existence des êtres, à leurs gestes et à leurs choix. Il veut donner à voir ce que Michel Foucault nomme « le grain minuscule de l’histoire » : les oubliés, les sans-voix. Ainsi, il compose des films qui intègrent documents, archives et récits de façon toujours singulière. Les Camisards (1972), Rude Journée pour la Reine (1973), Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma sœur et mon frère… (1976) et enfin L’Heure exquise (1981) ont marqué l’histoire du cinéma français en modifiant profondément la façon dont le cinéma peut composer avec l’histoire.

René Allio veut donner à voir ce que Michel Foucault nomme « le grain minuscule de l’histoire » : les oubliés, les sans-voix.

Tout au long de sa vie, René Allio tient inlassablement des carnets où l’on suit pas à pas les sinuosités de sa création. Un portrait, composé à partir d’un agencement de ses textes originaux, nous introduira au sein du secret atelier de cet artiste porté par un ardent désir d’invention.

« On n’est pas un artiste parce qu’on l’a d’abord choisi. On l’est comme on a une maladie, parce qu’il s’est fait un mélange de nos dons, de nos dispositions et de nos goûts avec quelque chose de plus profond qui est une sorte de mal à vivre et que le travail artistique canalise, colmate, accomplit en même temps qu’il le dévie et d’une pulsion mortelle fait une force de vie. Et puis on le choisit, après, on ordonne et on rationalise s’il se peut, on s’efforce de le maîtriser. Mais c’est comme un amour qui vous dévore, dont on sait qu’il vous détruira peut-être et qu’en même temps on défend à tout prix. »

Durant toute la durée du festival, les affiches de ses films seront exposées au Café des images, alors qu’un ensemble de documents d’archives issus du fonds René Allio de l’IMEC seront intégrés et retraités par le collectif Bells angels dans le cadre de leur exposition à la Comédie de Caen. Il s’agit d’explorer le processus de création de l’auteur à travers la genèse du film Pierre Rivière et les potentialités d’un projet inédit auquel René Allio travailla pendant près de vingt ans, Le Bon Petit Henri. Une conférence de Marguerite Vappereau au sein de l’exposition s’intéressera aux puissances d’oralisation de l’archive dans l’œuvre de René Allio. Comment actualiser des archives ? Dans quelle mesure peut-on les lire comme des partitions à interpréter ?

Exposition en partenariat avec l’IMEC.

Le Café des images et la Comédie de Caen remercie Annette Guillaumin pour son prêt d’affiches et de documents.


27 janvier

Ouverture de l’exposition des Bells angels à la Comédie de Caen.
Conférence de Marguerite Vappereau : René Allio, La voix des archives (Heure à préciser)

19h : Vernissage de l’exposition d’affiches au Café des Images.
20h30 : Projection de Rude Journée pour la reine (1973, 101 minutes)
Avec Simone Signoret, Jacques Debary, Olivier Perrier et Orane Demazis.
Une femme des années soixante se défait de ses peurs et de ses fantasmes pour enfin vivre sa vie.

Les projections seront accompagnées d’une lecture d’extraits des Carnets de René Allio.

11 février – René Allio en Normandie

14h : Projection de Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma sœur et mon frère… (1976, 125 minutes).
Un jeune paysan dans la Normandie du milieu du XIXème assassine plusieurs membres de sa famille puis passe aux aveux. René Allio, avec une troupe d’acteurs non professionnels, revisite l’événement à mi-chemin entre le fait divers et la tragédie. Ce film a été réalisé à partir du dossier réuni par Michel Foucault et son équipe.

12 février – René Allio et Marseille

Projection de La Vieille Dame indigne (1965, 94 minutes) avec Sylvie et Malka Ribowska (Heure à préciser).
Adapté d’une nouvelle de Bertolt Brecht, ce film suit les derniers mois d’une vieille dame qui, après le décès de son mari, décide de prendre un peu de bon temps.

Projection de L’Heure exquise (1981, 61 minutes) (Heure à préciser).
René Allio entremêle souvenirs, histoire familiale et portrait sensible de la ville de Marseille pour réaliser un film personnel et inattendu.