Présentation

Les films recourent constamment à des métaphores pour représenter le caractère d’un personnage, exprimer le sens d’une action ou fournir une clé d’interprétation du film. Ces figures peuvent faire l’objet d’une mise en relief (gros plan, ralenti, iris…) ou être insérés discrètement dans la trame de la fiction par le biais d’éléments diégétiques (objets, gestes, noms…) ou d’effets de style (composition de l’image, effets de montage…)

Activité
Interpréter les métaphores attachées au prénom de Madeleine et au fondu enchaîné des deux poussins au micro-ondes.



Métaphore de la madeleine

Le repas est composé des éléments suivants : jambon blanc, frites, flanby, babybel et petite madeleine. Il s’agit d’un repas régressif correspondant au choix spontané des enfants de 4 à 12 ans. Le flanby est utilisé par Madeleine comme un symbole de l’infantilisation générale des appelés au sein d’un stage valorisant l’obéissance aveugle sur un mode caricaturalement paternaliste.

« Petit coquillage de pâtisserie, si grassement sensuel (…) », comme l’écrivait Proust, la madeleine est un gâteau tendre, dodu et appétissant. Ce choix de prénom fonctionne comme une antiphrase ironique du comportement agressivement « viril » de Madeleine, afin de souligner l’inversion des rôles sexués au cours du film.

Après avoir subi une humiliation publique, Arnaud rejette avec exaspération la petite madeleine qu’il avait commencé à manger. Le réalisateur clôt ainsi la séquence sur une métaphore visuelle : Madeleine est infecte au propre comme au figuré.




Métaphore des poussins

Plusieurs procédés d’insistance signalent au spectateur le caractère symbolique de ce plan :
– l’attention des personnages sur le four à micro-ondes sans motivation dramatique ;
– le choix d’un long gros plan sur les deux poussins tournant lentement dans le four ;
– le recours à un fondu enchaîné, figure stylistique très marquée, souvent utilisée jusqu’aux années 50 pour marquer une ellipse de temps.

Par ce fondu enchaîné, le réalisateur « imprime » le plan des poussins sur le plan suivant d’une manière à la fois prégnante et énigmatique. Son utilisation relève d’un usage stylistique de la métaphore en insistant, au-delà de l’ellipse de temps, sur la mise en relation des deux plans.

Interprétation 1 : deux poussins dans le monde
Les deux personnages sur la barque succèdent aux deux poussins tournant sur leur barquette. Suivant un principe d’analogie, le réalisateur suggère qu’Arnaud et Madeleine sont deux personnages encore indéfinis qui s’ouvrent au vaste monde.

Interprétation 2 : une nature menacée
Décongeler deux poussins au micro-ondes après les avoir dégagés au pic à glace participe de l’assujettissement de la nature évoqué au cours du film. Le micro-ondes en gros plan semble, par effet de transparence, exercer son rayonnement sur l’ensemble du plan d’ensemble qui suit. Le fondu proposerait donc l’image spectrale des menaces de dérèglements naturels causés par l’action humaine qui justifient le survivalisme de Madeleine (illustré dans le plan par l’entraînement à la nage de combat).

Interprétation 3 : réchauffer la relation
Dans le second plan, Arnaud réitère ses efforts pour amorcer une idylle avec la réfrigérante Madeleine. Le plan du micro-ondes peut être interprété comme la métaphore de ce mouvement de surplace de leur relation tiraillée entre la chaleur du désir d’Arnaud et la froide indifférence de Madeleine. Le décalage entre le point de vue en plan d’ensemble sur le lac et le point d’écoute proche des personnages souligne avec ironie la solitude d’Arnaud après l’acceptation désinvolte de Madeleine de l’accompagner en boîte.