Fiche technique
Réalisation : Charlie Chaplin
Scénario : Charlie Chaplin et Harry Crocker
Musique originale : Charlie Chaplin
Photographie : Roland Totheroh
U.S.A – 1931 – 1h27
Interprétation
Charlie Chaplin : le vagabond
Virginia Cherill : la fleuriste aveugle
Harry Myers : le millionnaire excentrique
Synopsis
Un vagabond s’éprend d’une belle et jeune vendeuse de fleurs aveugle qui vit avec sa mère, couverte de dettes. Suite à un quiproquo, la fleuriste s’imagine le misérable, qui vient de lui acheter une fleur, en milliardaire…
PRÉPARER LA PROJECTION
Chaplin / Charlot
Charles Chaplin doit sa célébrité universelle à la manière dont ses films conjuguent l’inventivité burlesque à la puissance de l’émotion, la comédie et le mélodrame. Les deux vidéos proposées évoquent son œuvre de manière ludique et suggestive :
– Charlie Chaplin (ou presque) / Arte : bio-express sous forme d’animation fantaisiste
– Montage Charlot / Nick Fortunato : montage dessinant un portrait impressionniste de Charlot
Propositions d’activités
– Proposer un brainstorming aux élèves pour définir le personnage de Charlot à partir du montage d’extraits de films de Chaplin. Les élèves devront trouver en petits groupes trois mots caractérisant le personnage. Les termes trouvés seront ensuite regroupés sous forme thématique.
– Comment le choix de la musique et des plans orientent-ils le portrait de Charlot dans le montage ?
Ressource complémentaire
Ciné-club de Caen : filmographie commentée de Charlie Chaplin
Le cinéma burlesque
Le cinéma burlesque connaît son age d’or à l’époque du cinéma muet dans les années 10-20. Dominé par Buster Keaton, Harold Lloyd et Charlie Chaplin, le genre se définit par la succession de gags et de scènes comiques. Il se caractérise par :
– la confrontation à l’adversité : résistance des objets, hostilité de l’environnement social et situations périlleuses condamnent le héros burlesque à une adaptation constante.
– la virtuosité physique : acrobaties, mouvements chorégraphiques et performance athlétiques ponctuent le récit, rythmé par les bagarres et les courses-poursuites.
– le sens de la subversion : le caractère irrévérencieux du burlesque constitue une critique de l’autorité et des valeurs établies. La personnalité décalée du héros burlesque suscite de constants quiproquos.
– La revanche de l’irrationnel : le burlesque défie le sens de la logique dans le déploiement de gags reposant sur le détournement poétique.
Proposition d’activité
Analyser les gags présentés dans le montage ci-contre en les associant aux caractéristiques du burlesque.
Pistes d’observation
Du muet au parlant
Les Lumières de la ville est un film sonore dans lequel, en pleine transition du muet au parlant, Chaplin refuse de sonoriser les dialogues. Quels sont les différents moyens utilisés pour suppléer à l’absence de dialogues enregistrés ?
Du rire aux larmes
Les Lumières de la ville possède une double dimension comique et pathétique : relever les séquences qui vous semblent les plus représentatives de ces deux registres.
Le clochard et le millionnaire
Charlot noue une amitié avec un millionnaire lunatique et suicidaire. Interpréter leur relation en termes de critique sociale.
ANALYSE DU FILM
Un film sonore sans paroles
La sortie en salle des Les Lumières de la ville en 1931 s’inscrit dans la période de passage du muet au parlant, inaugurée par Le Chanteur de jazz en 1927. Si le film de Chaplin est un film sonore, intégrant un accompagnement musical et de nombreux bruitages, les répliques des personnages restent représentées par des intertitres. Ce choix artistique repose sur trois motivations :
– éthique : Chaplin considère que les « talkies »(« films parlotte ») dénaturent l’art de la pantomime, revendiqué dans le sous-titre du film : « A Comedy Romance in Pantomine ».
– économique : l’excellence de son burlesque muet assure l’universalité des films de Chaplin : faire parler Charlot pourrait le couper du public non-anglophone.
– esthétique : Chaplin considère que le parlant, dont la maîtrise technique est encore hésitante, rabaisse l’art cinématographique au rang de simple « théâtre filmé ». Plus généralement, il n’est pas pensable pour Chaplin de faire parler Charlot, car, disait-il, « le premier mot qu’il prononcerait ferait de lui quelqu’un d’autre ».
Ressource complémentaire
Chantons sous la pluie : les débuts du parlant
La mise en scène du son
Moment crucial, la scène de la première rencontre du Vagabond avec la fleuriste aveugle est celle qui a demandé le plus d’effort à Chaplin. En effet, le cinéaste a travaillé sur cette séquence délicate de janvier à avril 1929, pour parvenir à une solution pleinement satisfaisante en septembre 1930 seulement. Soit donc neuf mois de gestation pour à peine trois minutes de métrage – ce qui donne un aperçu concret du perfectionnisme acharné de Chaplin. L’idée qui va permettre la sortie de l’impasse s’avère particulièrement intéressante au regard de la période historique du passage du muet au parlant. C’est en effet la mise en scène d’un bruit de portière qui permet de répondre à l’enjeu dramatique de la séquence : introduire la méprise de la fleuriste sur le statut social de Charlot. Un bruit a priori anodin, mais qui a ceci de particulier : il n’est pas restitué sur la bande sonore, et donc le spectateur ne l’entend pas.
Du rire aux larmes
Les films de Chaplin s’inscrivent fréquemment dans le double registre du burlesque et du mélodrame comme Le Kid, Les Temps Modernes ou Les Feux de la rampe. Le mélodrame se caractérise par :
– un personnage de victime sans défense (femme, enfant ou infirme)
– une intrigue reposant sur des péripéties invraisemblables de nature providentielle ou catastrophique.
– un traitement mettant l’accent sur les effets pathétiques et la sentimentalité.
Dans Les Lumières de la ville, la pauvre fleuriste aveugle menacée d’expulsion puis retrouvant la vue à l’issue d’une opération miraculeuse s’inscrit pleinement dans le genre. L’habileté de Chaplin est de ne jamais opposer les deux registres, mais de les alterner constamment pour susciter l’émotion du spectateur.
Le burlesque dans tous les sens
Durant toute la période muette, les trois grands maîtres du burlesque ont construit un rapport singulier à l’espace :
– Charles Chaplin s’exprime de manière privilégiée dans un espace circulaire, cohérent avec son statut d’éternel vagabond sans assignation sociale.
– Buster Keaton déploie son incroyable énergie dans un espace horizontal correspondant à son caractère conquérant.
– Harold Lloyd privilégie les acrobaties verticales, symbolisant les aspirations d’ascension sociale de son personnage de self-made man.
Ressources complémentaires
CNC : livret enseignant
LAAC Franche-Comté : dossier pédagogique
UPOPI : analyse du film
Transmettre le cinéma : analyses de séquences
Académie de Nantes : le burlesque au cinéma
UPOPI : histoire du cinéma burlesque