Mustang (Deniz Gamze Ergüven, 2016)

L’intrigue de Mustang évoque la claustration forcée de cinq sœurs dans l’attente de leur mariage. Cette séquence met en scène un repas familial manifestant l’autoritarisme pesant de l’oncle des jeunes filles et les provocations dissimulées de la jeune Ece destinées à ses deux sœurs.

Exercice
Identifier les différents modes de relation son-image dans la séquence et analyser leur fonction.



1. Son hors-champ

Le son hors-champ se manifeste à trois reprises dans la séquence :

– le discours télévisé prônant l’assujettissement des femmes à des normes de comportement patriarcales. La propagande sexiste portée par le gouvernement d’Erdogan inscrit la situation de la famille dans le contexte politique plus large de la Turquie contemporaine en matière de restriction du droit des femmes. On remarquera à cet égard les attitudes contradictoires de l’oncle, très attentif à ce discours, et d’Ece, dont l’écoute méditative est soulignée par la caméra flottante et le recours au flou avant qu’un sourire de bravade ne s’affiche sur son visage.

– le bruit de coup de feu signalant le suicide d’Ece suite à son exclusion de la table familiale. L’effet de surprise est souligné à l’image par le sursaut de Lale et le raccord sonore sur le bref gros plan du visage de la grand-mère qui se retourne.

– les gémissements accompagnant la découverte hors-champs du cadavre d’Ece. Ces cris confirment son suicide avant que les deux sœurs soient évacuées précipitamment.

2. Son ambiant

La scène est ponctuée par le bruit très distinct des couverts qui souligne l’atmosphère pesante régnant à la table familiale soumise à l’autorité de l’oncle.


3. Son in

Le son in alterne entre les rires contenus des deux sœurs provoqués par les gestes de provocation d’Ece et les remontrances de l’oncle. On remarque à cet égard que la dynamique des raccords souligne la sourde rébellion des filles par les champs-contrechamps d’échanges de regards. Le montage visuel et sonore crée ainsi deux espaces opposés autour de la table : celui de la contestation (rires in) et celui de l’autorité contestée (rires hors champ). La bande sonore contribue donc de manière décisive à la mise en évidence de la révolte des filles face à l’oppression familiale et désigne la séquence comme métaphore politique.